Le Bois Sec Refleuri Traduit par Hong-Tjyong-Ou IX
San-Syeng
finds the house of Tjyang-So-Tyjei
empty and burned down. San-Houni appears in a dream,
reveals his identity as San-Syeng’s
father and tells him what is happening to
Tjyang-So-Tyjei, Reaching the town, San-Syeng
has himself arrested and put in the prison which is so
dark they cannot see
each other, though the women wonder on hearing his name.
The next morning Tjyang-So-Tyjei
sees the horse of her father outside the window,
exclamations lead to recognition.
The official identity of San-Syeng is proclaimed, the
magistrate is arrested,
the women released from prison. Mother and son, wife and
husband are reunited.
He orders a monument for the woman who drowned herself
in the lake ; they
visit the nun in the temple. Sù-Roung is arrested and
San-Syeng identifies
himself, and his mother who wants instant revenge for
the murder of her
husband. Sù-Young, the good brother, says that he will
die if his brother dies.
When they tell the king and queen what has happened, the
queen Tcheng-Y is sad because
she has not seen her father for 3 years. The idea comes
of a banquet for all
the blind men of the kingdom. En quittant la capitale, San-Syeng s'était
proposé un triple but :
s'assurer de la bonne exécution des ordres du roi ;
rechercher ses parents;
rejoindre son épouse. Le jeune homme ne se dissimulait
pas les difficultés
d'une pareille entreprise. Résolu à tout mettre en
oeuvre, il avait le plus
ferme espoir de voir ses efforts finalement couronnés de
succès. Avant tout, San-Syeng avait hâte de revoir
l'adorable Tjyang-So-Tyjei. Au
moment de s'approcher de la ville de Tjin-Tjyou, où
demeurait la jeune femme,
le nouveau général apprit que cette localité était
ensanglantée par l'émeute.
Immédiatement, San-Syeng requiert des troupes dans les
villes voisines, et en
peu de temps l'ordre est rétabli. Le mandarin, dont les
exactions avaient été
la cause première de la rébellion, fut arrêté. On le
transféra dans la capitale
en compagnie des principaux meneurs. Son devoir accompli, San-Syeng tout
heureux s'apprêtait à aller surprendre
joyeusement Tjyang-So-Tyjei. Hélas ! la maison dans
laquelle il comptait
retrouver son épouse avait été la proie des flammes. Il
ne put maîtriser sa
douleur et éclata en sanglots. L'intendant qui
l'accompagnait chercha à le
consoler. San-Syeng, à moitié fou, se laissa emmener. Il
apprit que la mère de
Tjang-So-Tyjei était morte, et que l'orpheline s'était
enfuie au moment de
l'incendie, sans qu'on sut de quel côté elle avait
dirigé ses pas. San-Syeng résolut de se mettre
immédiatement à la recherche de sa jeune
femme ; mais, brisé de fatigue, il dut se résoudre à
prendre quelques instants
de repos. Pendant son sommeil San-Houni lui apparut pour
la troisième fois et
lui dit: — Mon pauvre enfant, vous cherchez vos parents
et ne pouvez réussir à
les retrouver. Apprenez que c'est moi qui suis votre
père. Je jouissais autrefois
d'une grande influence à la cour, mais mon ennemi
Jà-Jo-Mi m'a fait exiler en
même temps que mon meilleur ami Sùn-Hyen. J'ai été
assassiné par Sù-Roung qui
devait me transporter a Jyo-Koum-To. Quant à votre mère
et à votre épouse elles
se trouvent actuellement à Saug-Tjyou. Un mandarin
scélérat les a condamnées à
mort. Hàtez-vous d'aller à leur secours ; le moindre
retard serait funeste. San-Syeng, réveillé, se mit immédiatement
en route. Bientôt il atteignit la
ville dont San-Houni lui avait parlé en rêve. Il ne
tarda pas à apprendre que
sa mère et sa femme, injustement accusées de vol,
étaient effectivement en
prison et devaient le lendemain même être mises à mort.
Le jeune homme courut à la prison. Il lui
fut impossible d'y pénétrer. Il
eut alors recours à un stratagème. Entrant chez un
marchand, il déroba un objet
quelconque et feignit de s'enfuir. Arrêté, il fut jeté
en prison. Avant d'employer cette ruse, San-Syeng
avait ordonné à son serviteur de
venir se poster le lendemain, dans la matinée, devant la
prison avec le cheval
de son maître. La salle dans laquelle le jeune homme fut
introduit après son arrestation,
était fort obscure. Plusieurs personnes y étaient déjà
enfermées ; mais il lui
fut impossible de les distinguer. Pour avoir de la
lumière il se disputa avec
un de ses voisins, ce qui devait inévitablement avoir
pour résultat l'arrivée
du gardien. À peine celui-ci eut-il entendu des cris,
qu'il accourut. Il
s'interposa entre les deux hommes. — Je vais vous signaler au mandarin,
dit-il au fils de San-Houni. Quel est
votre nom? — San-Syeng. En entendant ce nom, Tjyang-So-Tyjei et
Tcheng-Si furent au comble de
l'étonnement. Elles parlèrent entre elles à voix basse :
« C'est bien ainsi que
s'appelle mon fils, dit Tcheng-Si ; mais ce n'est pas
lui qui se trouve ici,
car il n'est pas un voleur. » La nuit se passa sans que San-Syeng eut pu
se faire reconnaître par les
deux femmes. Au matin, on entendit tout à coup le
hennissement d'un cheval.
Aussitôt Tjyang-So-Tyjei, s'approchant de l'ouverture
qui laissait pénétrer la
lumière dans la prison, s'écria : — Venez donc voir ma mère ! Le cheval qui
vient de hennir est celui-là même
que j'ai donné à mon mari, ou en tout cas lui ressemble
d'une façon frappante. Tcheng-Si, répondit en gémissant: — Hélas, qui sait où est mon pauvre iils.
. Alors San-Syeng s'approchant de celle qui
était sa mère lui demanda la
cause de son chagrin. Tcheng-Si lui raconta ses tristes
aventures, depuis son
départ pour l'exil avec San-Houni jusqu'à son
arrestation et à sa condamnation
par le mandarin de Sang-Tjyou. A son tour, le jeune homme fit le récit de
ses malheurs. « Je porte gravé
sur mon bras le nom de San-Syeng, dit-il en terminant,
mais j'ignore qui m'a
fait celle empreinte ineffaçable. » Tjyang-So-Tyjoi qui avait assisté à cette
conversation, s'écria : — Dites-moi, comment s'appelle votre
femme, et dans quelle ville elle
habite. — Tjang-So-Tjyei est le nom de mon épouse
; elle habitait la ville de
Tjiù-Tjyou ; mais j'ai trouvé sa maison brûlée. — O mon cher San-Syeng, dit la jeune
femme, je te retrouve enfin. Et,
s'adressant à Tcheng-Si : — Ma mère, voici votre fils. Tous trois s'embrassent en pleurant. Les
deux femmes étaient encore plus
tristes, en songeant que bientôt elles devraient mourir
après avoir touché de
si près au bonheur. San-Syeng les rassura. Il jouissait
de pouvoirs
extraordinaires dont il allait sur-le-champ faire usage.
A ce moment même l'intendant du jeune
général entrait dans la prison. Il
reçut l'ordre de faire annoncer dans la ville l'arrivée
de San-Syeng,
représentant spécial du roi. On devait mettre la main
sur le mandarin et le
mener à son tour en prison. Quelques instants après l'intendant
revenait annoncer à son maître que ses
ordres étaient exécutés. En même temps tous les
fonctionnaires accouraient à la
prison. Ils s'empressaient autour de San-Syeng et lui
présentaient
respectueusement leurs hommages. Sur leurs instances, le
fils de San-Houni quitta
la prison avec ses compagnes pour se rendre à
l'hôtel-de-ville. Tjyang-So-Tjyei, ayant aperçu le cheval
qu'elle avait donné à son mari,
courut vers le brave animal et l'embrassa tendrement sur
les naseaux. Le
coursier semblait comprendre, car ses yeux, tournés vers
la jeune femme,
étaient mouillés de larmes. — Ne pleure pas, mon cher cheval, dit
Tjyang-So-Tjyei. N'as-tu pas été plus
heureux que moi en accompagnant sans cesse celui que
j'aime et dont j'étais
séparée ? San-Syeng, témoin de celle scène, attira
doucement sa femme sur son coeur
et lui dit, en baisant ses cheveux : — Désormais nous ne nous quitterons plus.
San-Syeng, au comble du bonheur d'avoir
retrouvé à la fois sa mère et sa
femme, désirait aussi être renseigné au sujet de son
père. Tcheng-Si, les
larmes aux yeux, lui raconta les infortunes de
San-Houni. — Ne te désoles pas, ma chère mère; dit
San-Syeng. Après tant de
souffrances, tu auras le bonheur en partage. Je ferai
tout ce qui pourra
contribuer à te rendre heureuse. Allons d'abord voir la
soeur Out-Poug qui a
été si bonne pour toi. Cette proposition fit un très grand
plaisir à Tcheng-Si. On se mit en route
pour le temple de Ro-ja. En passant près du lac qui lui
rappelait de si tristes
souvenirs, Tcheng-Si arrêta son fils. Elle lui fit un
touchant récit du
dévouement de la vieille femme qui s'était sacrifiée
sans aucun espoir de
récompense. — Ma mère, dit San-Syeng, je veux qu'il
soit élevé en cet endroit un
monument pour perpétuer à jamais le souvenir du sublime
dévouement de ta pauvre
compagne. L'intendant recul l'ordre de faire venir
immédiatemenl des ouvriers pour
procéder à l'érection du monument. Avant d'arriver au temple de Ho-ja,
Tcheng-Si, en passant près de la forêt
de bambous, rappela à son fils dans quelles tristes
circonstances il était venu
au monde. Tous ces souvenirs arrachaient des larmes à la
mère infortunée, et
ses enfants, de leur côté, ne pouvaient s'empêcher de
laisser paraître leur
profonde émotion. La soeur Out-Poug ne s'attendait pas à
revoir si promptement Tcheng-Si et
sa bru. — Voici mon fils, dit l'ancienne compagne
de la religieuse. San-Syeng adressa à la religieuse de
chaleureux remerciements pour toute la
bonté qu'elle avait témoignée à Tcheng-Si. — Ne me remerciez pas, Monsieur, dit la
soeur, je n'ai fait que mon devoir
en protégeant une femme malheureuse. C'est le Bouddha
qui a eu pitié d'elle et
qui l'a récompensée de sa piété et de sa longue attente
en lui permettant de
vous retrouver. Sous la surveillance de l'intendant une
pagode avait été rapidement élevée
sur les bords du lac. On pouvait y lire cette
inscription : A la bienfaitrice
de ma mère, je voue une éternelle reconnaissance. La religieuse consentit à aller avec ses
hôtes voir le monument qui venait
d'être élevé. San-Syeng avait donné des ordres pour
qu'on dressât la table du
sacrifice devant la pagode et qu'on lui amenât Sù-Roung.
On devait saisir
toutes les richesses du voleur. A ce moment même, Sù-Roung racontait à son
frère Sù-Young le rêve étrange
qu'il avait fait la nuit précédente. Il s'était vu
entouré de flammes, la tête
dans une grande chaudière. — Cela prouve que ta fin est prochaine et
que tu mourras par la volonté
d'un homme, dit Sù-Young. Pourquoi aussi te laisses-tu
toujours aller à
l'emportement? Il se pourrait bien que ce soit le
remords et la crainte que
t'inspirent la présence dans le pays d'un envoyé du roi
qui trouble ainsi ton
sommeil. Sù-Young n'avait pas achevé ces paroles
qu'on frappait à la porte. En
quelques minutes Sù-Roung était réduit à l'impuissance
et solidement garotté.
Les objets volés furent saisis, et l'on se dirigea vers
la pagode. Quand le voleur eut été amené en face du
jeune général, celui-ci lui
demanda : — Je m'appelle San-Syeng. Me
connaissez-vous? Sù-Roung, très surpris, mais ne pouvant
s'imaginer que son fils adoptif eut
été élevé à la haute dignité d'envoyé du roi, répondit :
— Votre nom ne m'est pas inconnu ; mon
fils se nomme aussi San-Syeng. — Vous avez donc un fils ? — Oui. Il m'a quitté il y a trois ans pour
se rendre à la capitale et
depuis je n'ai pas eu de ses nouvelles. — Eh bien, apprenez que je suis celui dont
vous vous vantez d'être le père.
Je ne suis pas le fils d'un assassin. J'ai retrouvé ma
mère qui m'a instruit de
ma naissance et de vos crimes. La reconnaissez-vous, ma
mère ? ajouta San-Syeng
en désignant Tcheng-Si, au brigand. Tcheng-Si, qui depuis un moment
considérait attentivement Sù-Roung, s'écria
: — Comment misérable, tu vis encore? Je
rends grâce au ciel qui m'a permis
de te retrouver pour assouvir ma vengeance. Mon fils
voici le meurtrier de ton
père. Tue-le de ta propre main. Je veux me repaître de
son foie. La mère de San-Syeng était hors d'elle.
Son fils chercha à la calmer. Il
dut lui représenter qu"il n'avait pas le droit de faire
mourir un homme
sans un ordre du roi. Tcheng-Si n'insista pas. D'autres
pensées l'envahirent
quand elle se fut, avec tous les assistants, agenouillée
dans la pagode afin de
prier pour l'âme de la malheureuse vieille femme à qui
elle devait la vie. Sù-Roung fut dirigé sur la capitale.
San-Syeng, s'adressant à Sù-Young, lui
dit : — Vous avez toujours été un homme loyal.
Prenez ces objets que votre frère
s'est injustement approprié. — Je vous remercie. Je n'ai plus besoin de
rien ; car je vais mourir avec
mon frère. — Je ne comprends pas voire détermination.
— Quand on coupe un arbre, les branches
continuent-elles à vivre? — Mais si votre frère était un criminel,
vous n'avez rien à vous reprocher
personnellement. — C'est vrai ; je n'en persiste pas moins
à vouloir quitter la vie en même
temps que mon frère. San-Syeng ne put faire renoncer Sù-Young à
son fatal dessein. Avant de
retourner dans la capitale, le fils de San-Houni visita
encore plusieurs
provinces. Quand sa mission fut terminée, il alla rendre
compte au roi de tout
ce qui lui était arrivé. La reine avait demandé à
entendre le récit des
aventures du jeune général. Quand San-Syeng, eut cessé
de parler, Tcheng-Y
s'écria en pleurant: — Vous êtes plus heureux que moi. A bout de forces, elle se laissa glisser à
terre. Chacun s'empressa respectueusement autour
de la reine, qui ne tarda pas à
recouvrir ses sens. Alors San-Syeng lui demanda, en se
prosternant devant elle,
quelle était la cause de son chagrin subit. — Hélas ! répondit Tcheng-Y, il y a trois
ans que j'ai quitté mon père, et
depuis je n'ai jamais eu aucune nouvelle de lui. Voilà
ce qui m'attriste si
profondément. Le roi et son général assurèrent qu'ils
useraient de tous les moyens
possibles pour faire retrouver le père de la souveraine.
Celle-ci, après avoir
longuement réfléchi, s'écria tout à coup : — Eh bien, qu'on réunisse tous les
aveugles du royaume en un grand banquet.
Je veux leur faire à chacun un cadeau. — Majesté, répondit San-Syeng, il sera
fait selon vos ordres. Immédiatement l'ordre fut expédié à tous
les mandarins d'avoir à envoyer à
la capitale tous les aveugles de la Corée. |